Mugabe à la tête de l’UA
Lorsque fut fondée l’Organisation de l’Union Africaine, en mai 1963, l’écrasante majorité des présents, au nom du peuple africain qu’ils étaient censés représentés, avaient fixé une ligne tellement rouge qu’elle fait encore peine et mal aux yeux, à voir, plus de 50 ans après.
En effet, le principe de l’intangibilité des frontières, héritées de la sinistre et par trop funeste Conférence de Berlin (novembre 184-février 1885). C’est vraiment le tout premier crime – d’une longue série – commise par cette organisation qui se révélera en fait être un véritable syndicat de chefs d’Etat (si on peut leur concéder ce titre…) dont l’une des préoccupations majeures, sinon la plus importante, est la préservation de leurs fauteuils présidentiels qu’ils ont trop souvent tendance à confondre avec un siège royal voire impérial.
L’Osagyefo Kwamé Nkrumah, se rendant compte que son rêve d’Unité africaine prenait le chemin d’un cauchemar avec l’officiellement par ses pairs de la balkanisation du continent, quittera la salle de réunion, en larmes et s’en ira chez lui. Enfin, il n’aura pas le temps d’arriver chez lui car il sera poursuivi et retenu par le Négus himself, Haïlé Sélassié, qui le suppliera de ne pas pratiquer la politique de la chaise vide et de retrouver les autres pour discuter. Nkrumah acceptera. L’Wsir Cheikh Anta Diop (CAD) avait pourtant, dès les années 50, avertit ses compatriotes africains sur la sudaméricanisation* possible de notre terre. Combien parmi ces gens avaient lu CAD ?
Nkrumah, le Ghana… Dans ce territoire, alors appelé Gold Coast, par les bandits au moment de son occupation, Robert Gabriel Mugabe, jeune africain (nous sommes en 1958) y séjournera et exercera comme enseignant, au sein d’une école spécialisée dans la formation des instituteurs. C’est plus tard qu’il rentre dans l’actuel Zimbabwe pour fonder la ZANU (Zimbabwe African National Union)** et mener la lutte pour l’indépendance.
Hier, vendredi 30 janvier 2015, j’ai appris avec joie que Mugabe a été porté par ses pairs à la tête de l’Union Africaine qui, depuis septembre 1999 le nouveau nom de l’OUA. C’est un sentiment de joie qui m’anime en tapant ces lignes. Je ne suis pas un doux rêveur en pensant qu’avec Mugabe, l’UA va devenir un tigre renversant tout sur son passage, bousculant les mauvaises habitudes de cette institution des plus sclérosées de Kama.
Les textes de l’UA sont clairs. C’est, en gros, Stop, on ne fait rien ! On ne se presse surtout pas !
Mugabe est certes, à mes yeux, le meilleur chef d’Etat que notre continent ait actuellement.
Il est certes le seul à pouvoir dire leur fait aux officiels occidentaux qui ont voulu en faire leur tête de turc.
Il est l’un des rares à avoir eu le courage de lancer une réforme agraire, dans cette partie du continent (Afrique australe et de l’Est) où la frilosité semble être la règle, concernant ce dossier explosif : faut-il rappeler que bientôt onze ans après l’arrivée au pouvoir de l’ANC (Africa National Congress), rien sinon pas grand-chose n’a lieu à ce propos en Azanie ?
Mugabe a eu le courage de revoir les contrats miniers entre le Zimbabwe et les majors occidentales : désormais, le Zimbabwe aura des parts majoritaires. Et lorsque ces contrats furent mis en place, Mugabe ne prit pas de gants pour signifier à qui n’était pas d’accord que les portes de son territoire étaient ouvertes pour leur départ.
Je pourrai citer mille autres raisons qui font que j’aime par-dessus tout cet homme, que je me réjouis de son élection à la tête de l’UA.
Certes.
Le principe de réalité me commande tout de même de ne pas abuser dans la manifestation de ma joie car la machine est par trop mauvaise ; le système est vérolé de l’intérieur et aucune bonne volonté, en si peu de temps, peut amener les choses dans la direction que nous souhaitons, pour que ce continent et son peuple augurent des lendemains meilleurs, à court ou moyen terme.
Connaissant le pouvoir de la Commission, je fis partie des gens qui s’étaient réjoui de voir Nkosazana-Dlamini Zuma élue en en battant Jean Ping, pour la tête de la Commission de l’UA. J’ai vite déchanté et revenu à la même conclusion que Nkrumah avait déjà tirée en son temps.
De deux choses l’une :
- ou nous renversons la table ;
- ou nous cassons l’UA quitte à ce que deux ou trois dirigeants éclairés, conscients des enjeux, conscients que l’émiettement du territoire nostre ne profite qu’à nos ennemis et jamais à la plèbe de kamit, se décident à lancer les Etats-Unis d’Afrique. Il suffit en effet que deux territoires le fassent pour que les EUA soient une réalité. Les USA ont commencé à 50 ? Non, tout le monde le sait. On voit où ils en sont aujourd’hui…
Bravo à et pour le Vieux Com’rade Bob, mais bon…
Obambe NGAKOSO, January 2015©
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* : Les fondements économiques et culturels d’un état fédéral
** : Devenue ZANU-PF (Zimbabwe African National Union – Patriotic Front)
En effet, cette nomination est un véritable chant d’espoir pour Kama. Merci pour cet article.
Frère.
Soyons sérieux.
Être un héros de l’indépendance de son pays ne fait pas de vous son Alfa et son Oméga.
Bravos pour sa lutte de libération de la Rhodésie mais monsieur Mugabe ne peut être encensé comme vous le faites, frère.
Il a en réalité manqué de vision jusqu’à lors et a réactivité la fibre panafricaine quand il était en difficulté. Le traitement qu’il a fait subir à ses opposants est indigne d’un homme de son acabit.
Finalement, les supposés partis panafricains en Afrique ont maille à faire avec la démocratie à l’image de l’upads au Congo, de l’anc en Afrique du Sud, et du zanu-pf de Mugabe.
L’UA n’est qu’un syndicat de vieux dictateurs qui n’apportent aucun bien être aux peuples noirs, à quelques exceptions près.
Bonsoir sœur (ou frère, je ne sais pas, mais ce n’est pas important),
Merci pour cette réaction qui confirme que ce baobab ne peut laisser indifférent.
« Être un héros de l’indépendance de son pays ne fait pas de vous son Alfa et son Oméga.
», je ne pense pas avoir dit cela. Pas une seule fois.
A partir du moment où vous dites « les supposés partis panafricains », est-ce encore utile d’en rajouter ? Tout n’est-il pas dit ? J’avais voté pour l’UPADS en 1992, je peux en témoigner.
« L’UA n’est qu’un syndicat de vieux dictateurs qui n’apportent aucun bien être aux peuples noirs, à quelques exceptions près. » A part le mot dictateur, que je n’utilise pas (je l’ai rayé de mon vocabulaire), ne disons-nous pas la même chose au sujet de l’UA ?
Obambe
Frère.
Je suis un homme.
Je ne sais pas quel mot emprunter dans la langue du colonisateur pour dénommer la somme du népotisme, du despotisme, de la corruption, du tripatouillage des élections, de la traque de ses opposants, de l’autocratie, etc.
Alors, j’utilise « dictateur » mais pas dans la même acception que lui donnent les ennemis objectifs de Kama ou de l’Afrique ( quand on porte un nom dont je ne sais s’il vient d’un supposé général grec ou d’un yéménite, je présente mes excuses) qui sont eux-mêmes aussi des dictateurs qui s’imposent à nous depuis le XIVe siècle.
Par contre, en aparté, bravo pour votre nouvelle émission sur Info Média One, mais… Pourquoi lors de l’interview du Doyen Président Eboundit, avoir donné l’impression que vous ne vous connaissez pas?
Bon. Ce n’était qu’une impression.
Bonjour Mfoa Nkuna,
Merci pour la précision, frère (sur le genre).
Avec le Vieux Eboundit? Je ne sais pas. J’ai essayé, dans la mesure du possible, de garder une certaine distance. J’ai essayé, pas évident. Choix délibéré en effet.
Obambe