Epurebere, adi ibo ya ndziya yo: le blog d'Obambé Mboundze Ngakosso

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24 juin 2014

Au Congo-Mfoa, dimanche, les chirurgiens vont tous à l’église!

Classé dans : Santé - Médecine et autres sciences — Obambé Mboundze GAKOSSO @ 10 h 57 min

Le téléphone vibre et je reconnais le numéro.

Super, me dis-je !

On se salue et on attaque le plat de résistance. Ma petite maman :

-          Quand tu m’as appelée, j’étais en ligne avec ta maman P.

-          Ah ! comment va-t-elle ?

-          Elle, ça va, mais ton oncle D. pas bien du tout.

-          Ah ! bon ? Qu’a-t-il donc ?

Dans ce magnifique pays qu’est le Congo, embarqué sur le navire appelé « Chemin d’avenir », les citoyens et les citoyennes meurent tous les jours comme des chiens, sans la moindre chance de jouir des bienfaits de ce « Chemin d’avenir »… Aussi, quand on a la chance d’avoir un proche (ami, parent, etc.) au téléphone, on remercie nos ancêtres. Quand on a des nouvelles des uns et des autres, d’une manière ou d’une autre, cela peut égayer nos journées.

Je me mis donc à paniquer en entendant ma petite maman me donner des nouvelles de maman P. et de son petit-frère D.

-          Ta maman P. a amené ton oncle D. à l’hôpital de toute urgence. Pour une appendicite ;

Tiens ! c’est bien la première fois que j’apprenne qu’un homme proche de la cinquantaine pouvait souffrir d’appendicite. Vraiment, on apprend tous les jours et quand je pense à tous ces gens qui sont persuadés de tout connaitre et de tout savoir, c’est vraiment de la pitié que je ressens pour eux.

Ma petite maman continue :

-          En arrivant à l’hôpital, il n’y avait aucun chirurgien, hélas ! pour faire l’opération sur ton oncle.

-          Comment ça, pas de chirurgien ?

-          Tu as bien entendu, dimanche, il paraît qu’il n’y a pas de chirurgien au CHU (Centre hospitalier et universitaire). Quand elle y est arrivée avec ton oncle, il n’y avait aucun chirurgien pour l’opérer. Ils sont restés ainsi du matin jusqu’au soir.

En fait, je ne devais être surpris ni étonné par ce genre d’informations. Pas besoin de vivre au Congo 12 mois sur 12 pour se rendre compte que cet enclos colonial, par bien de pans, plonge sans cesse dans la fange la plus nauséeuse. Dès que l’on parle de santé et d’école, on a envie de pleurer. Non pas que les pleurs y changeraient quoi que ce soit – nos dirigeables n’en ont strictement rien à foutre ! – mais c’est une des seules choses qui nous reste en réalité.

Comment le plus grand établissement hospitalier de la capitale (plus d’un million d’habitants) d’un enclos colonial (quatre millions d’habitants) peut se payer le luxe de manquer de chirurgien sous prétexte qu’on est dimanche ? Est-il écrit dans les textes de cet « hôpital » que les dimanches, les chirurgiens sont dispensés de pratiquer leur art, leur métier et leur devoir ?

Cette histoire (que j’ai volontairement abrégée car elle est plus longue que ça) serait digne d’un roman ou d’un recueil de nouvelles. Pourtant, c’est une réalité que les nôtres vivent tous les jours sans que cela ne choque une quelconque autorité de la santé. Pour résumer, on a cette hiérarchie, de bas en haut :

-          Chef de service ,

-          Directeur général de l’hôpital ;

-          Directeur département de la Santé ;

-          Directeur général de la Santé ;

-          Ministre de la Santé ;

-          Président de la République.

Peut-être que je me suis trompé quelque part. Cependant, il doit quand même y avoir quelque chose qui cloche dans cette chaîne.

Cette macabre histoire, si je la racontais à une personne d’à peu-près normalement constituée, vivant dans un pays où un minimum de sérieux existe, notamment dans les structures hospitalières, serait perçue comme une blague. De très mauvais goût. Pourtant là aussi, nous sommes au regret de constater que chaque jour qui passe nous apporte son lot d’hallucinations au royaume du « Chemin d’avenir » où la médiocrité a été érigée en mode de gestion de gouvernance.

Dans les années 80, le même président nous avait dit Santé pour tous d’ici l’an 2000. Quand l’an 2000 est arrivé (il y a 15 ans, juste pour rappeler), je ne sais pas si les Congolais avaient eu droit à cette « Santé pour tous ». Toujours est-il qu’aujourd’hui, rien, rien, mais vraiment rien du tout ne donne l’impression que les Congolais bénéficient d’un système de santé de qualité…

En fait, je suis méchant. Le dimanche étant le jour du Seigneur et tous nos médecins, en bons chrétiens pratiquants qu’ils sont, extrêmement dévots, devaient tous être dans leurs églises en train de prier. Du matin au soir. Ce doit être ça…

Obambe GAKOSSO, June 2014©

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