Nouvelle vente du Mali via un (nouvel) « accord » de défense
Si la plupart de nos enclos coloniaux, sous leurs formes actuelles, doivent leur existence au banditisme de l’État français, espagnol, portugais ou autres*, il faut, il sied et il est impératif de rappeler que tous les noms qu’ils portent ne sont pas dus au bon vouloir de ces bandits.
C’est le cas notamment du Mali dont le nom remonte à une époque lointaine où l’Afrique était en pleine gloire et ses enfants ne rêvaient aucunement d’aller chercher une sorte de bien-être hors des terres de leurs ancêtres. Bien au contraire, c’était à une époque où dans les États arabes et dans les États occidentaux, on fuyait toutes sortes de maux pour aller voir ailleurs si l’herbe était plus verte. Un ailleurs qui était bien souvent Africain…
Le Mali fut un empire que l’on peut situer allant des côtes de l’actuel Sénégal et d’une bonne partie de l’actuelle Mauritanie, jusqu’à des parties des actuels Mali, Burkina-Faso, Niger, Gambie, Côte d’Ivoire et Guinée. Autour du quatorzième siècle, sa population atteignit environ 50.000.000 d’habitants. C’est dans cet empire que règnera le célèbre Sogolon Djata (ou Sundjata Keïta) de 1235 à sa mort (1255). C’est lui qui fonda cet immense empire. C’est lui qui inspirera la rédaction de la toute première charte des droits humains connue sous le nom de Charte du Mandé ou Charte du Kurukan Fuga.
Dans ce même empire, de 1312 à 1332 (ou 1337 selon les sources), règnera Kankou Moussa, le dixième Mansa (« Roi des rois ») de cet empire. Selon des statistiques établies récemment***, cet homme a été classé comme le plus riche (matériellement parlant) que l’humanité ait jamais connu. En 1324, il part en pèlerinage à La Mecque avec une suite de 60.000 personnes ( !!!), entre 50 et 300 livres d’or sur chacun des 80 dromadaires de son équipage ( !!!) Il distribuera tellement d’or le long de son parcours que le cours de ce métal baissera très fortement.
En ce temps-là, cet empire avait une armée. Sogolon Djata avait en effet dix mille cavaliers, cent mille fantassins. Il mettra en place, après avoir conquis des royaumes voisins, un gouvernement militaire au Nord (à Sura) et un autre au Sud (à Sankaran) et fera de Niani la capitale de son empire. Lui et ses compatriotes, à l’époque, n’avaient pas besoin de prendre des bateaux, des caravanes pour aller signer des « accords de défense » à Paris ou London.
Dans la même région (Ouest de Kama), avant le Mali, il y eut l’empire de Ghana (ou du Wagadou qui en fait était son royaume originel) avec une superficie bien plus petite et plus situé vers l’actuelle Mauritanie. Sa capitale était Koumbi-Saleh (20.000 habitants). Cet empire dura de 300 à 1240 environ, soit à peu-près de neuf siècles et demi ! Selon le géographe et historien (1014-1094), l’armée de Ghana compta 200.000 guerriers dont plus de 40.000 archers.
L’empire Songhaï sera celui qui succèdera à l’empire du Mali et qui existera du quinzième au seizième siècle (fin en 1591). Il aura une taille à peu-près similaire à celui du Mali et donc beaucoup plus grand que Ghana. L’État Songhaï, qui existait depuis le septième siècle) était passé sous la coupe de l’empire du Mali en 1300 et sous l’impulsion de Sonni Ali Ber (mort en 1492) qu’il recouvrera son indépendance. Gao est choisi comme capitale administrative du Songhaï et son armée (de métier) est composée d’une infanterie, d’une flottille et d’une cavalerie).
940 ans environ pour l’empire de Ghana. Plus de trois siècles pour l’empire du Mali. Un siècle environ pour l’empire du Songhaï. Les durées de ces vies de ces différents empires devraient faire réfléchir à deux fois (au moins), les françafricains qui continuent à croire naïvement que notre salut ne saurait passer par un autre chemin que celui de Paris. Actuellement en effet, la France propose un nouvel « accord » de défense au Mali qui depuis des années souffre chroniquement de la faiblesse de son armée qui n’arrive pas à défendre ses 1.200.000 kilomètres carrés. En voyant le spectacle actuel et l’aplatventrisme des dirigeants politiques maliens, Sogolon Djata et Kankou Moussa doivent se retourner dans leurs tombes.
Le 20 janvier 1961, peu après l’indépendance formelle du Mali, le président Modibo Keïta (1915-1977) faisait fermer les bases militaires françaises du Mali. C’est cette date qui depuis lors fait officie de fête de l’armée malienne. Aux yeux des françafricains, en fait, Modibo Keïta est un grand malade qui n’avait rien compris mais vraiment rien du tout. Comment donc : fermer une base militaire de la « mère-patrie », de la douce France, ce pays merveilleux qui est « venu nous apporter la civilisation », à nous autres « sauvages » ?
En 1960, le Mali était dirigé par un instituteur qui subira un putsch mené par Moussa Traoré (né en 1936), un militaire. Quand on ira annoncer au ministre Mamadou Gologo (1924-2009) la nouvelle, ce dernier éclatera de rire car pour lui c’était tout bonnement impossible que Moussa Traoré puisse être l’instigateur de quelque putsch que ce soit. Non pas qu’il fut un soldat loyal, mais vraiment, pour être poli, on dira que son intelligence ne lui permettait même pas d’imaginer pareille action : la France avait frappé via le troisième homme et s’était débarrassé d’un leader Panafricain plutôt gênant****. Un autre militaire chassera Moussa Traoré en 1991, Amadou Toumani Touré dit ATT (né en 1948). Ce dernier sera remplacé après des élections auxquelles il ne prendra pas part en 1992 par un archéologue Alpha Oumar Konaré (né en 1946). Ce dernier fut ministre de la Culture du président Traoré et il enseigna aussi ATT.
De ces quatre présidents, un seul a eu la volonté de se débarrasser de la tutelle française. C’était le premier qui en plus avait fait quitter son pays de la zone franc CFA. Les autres n’ont fait qu’être de bons et magnifiques exécutants des basses œuvres françaises. Le pouvoir actuel semble aller sur la même voie en se compromettant complètement avec la Franc à qui elle sous-traite la défense de son territoire. On a d’ailleurs vu le résultat : il suffit de voir comment cette armée, excédée par l’indécision et la nonchalance d’ATT lors de la gestion de la guerre au Nord, provoquée par les bandits appelés gentiment djihadistes pour se rendre compte que la fameuse démocratie malienne n’a été qu’un leurre. Un leurre de plus qu’on a vendu aux Africains 20 ans durant.
Selon le site maliactu.net, avant le 14 juillet, cet accord devrait être signé. On dit merci qui ? Ibrahim Boubacar K., officiellement président du Mali…
On aurait pu rêver que la crise, que dis-je, les crises successives maliennes servent à mettre les bases d’une armée Panafricaine. Mais rien de chez rien du tout. Oui, on aurait pu rêver…
Obambe GAKOSSO, June 2014©
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* : Incarné par les envahisseurs appelés colons, missionnaires etc. Bref ! des bandits !
** : https://frindethie.wordpress.com/tag/lempire-du-mali/#
**** : C’est un pléonasme, je sais.