Délinquants en col blanc, et si on faisait un rêve?
Il y a quelques mois je faisais un parallèle entre le trafic de drogue colombien Pablo Escobar et nos bandits. Je me souviens encore des retours que j’ai eus par email et sur mon portable. La pilule fut trop grosse à avaler.
Je suis tombé récemment sur un bout de reportage concernant les favelas de Rio Janeiro. Le journaliste a évoqué les trafiquants de drogue qui font régulièrement des dons de diverses natures aux populations de ces favelas : denrées alimentaires, fournitures scolaires et j’en passe.
J’ai souri.
C’est fou comme certains bandits adorent se ressembler dans leurs actes, gestes et comportements.
Il suffit d’allumer certaines chaînes de télévisions africaines pour se rendre compte à quel point du matin au soir des dons déferlent sur la plèbe africaine : des épouses de présidents ; des ministres et épouses de ministres ; des DG (Directeurs généraux) et leurs épouses ; des « hommes d’affaires » ; des patrons de nébuleuses appelées sans la moindre gêne « fondations » ; etc. Tous et toutes, comme des magiciens, déversent des sacs de riz, des sacs de sel, des cahiers, des stylos, des cartables et je ne sais quoi d’autre.
Décidément, ces gens ont bien des similitudes. Ils accumulent des sommes d’argent astronomiques, en comparaison de leurs concitoyens. Cela se passe à une vitesse monumentale. Quand un honnête fonctionnaire dans les années 80 mettait de dix à vingt ans pour acheter un terrain de vingt mètres sur vingt et pour y bâtir une maison (ce qu’il ne peut plus faire aujourd’hui dans un enclos colonial comme le Congo Rive droite), ces experts et autres spécialistes en dons le font en un seul trimestre. Et quand je dis un seul trimestre, c’est vraiment dans le cas où ces gens se contentent d’une seule construction. Sinon, au meilleur de leur forme de l’olympisme du banditisme, ils sont capables d’en faire même dix en même temps.
En les comparant, il m’arrive d’avoir un peu de tendresse pour ces trafiquants de drogue et autres vendeurs de tous produits des Favelas car eux au moins, n’ont pas l’impudeur de taper dans la cassette commune. Oui, leur drogue tue et plein de gosses en meurent. Mais les nôtres de bandits en col blanc, dans leurs magnifiques costumes venant de Paris et de Milano, je suis sûr qu’ils tuent plus que ces bandits des favelas. Les nôtres de bandits volent des centaines de millions de francs coloniaux à longueur de journées. De l’argent qui devrait être dans les services éducatifs, sociaux et sanitaires. Au moins. Ces bandits de grands chemins veulent s’acheter une gloire qu’ils n’ont pas au quotidien. Hélas ! pour eux, la plèbe n’est pas dupe. En tout cas pas la plèbe dans son ensemble. Il y a certes quelques uns de leurs amis et parents qui les déifient.
Hélas ! encore une fois pour eux, ils auront beau donner et se donner en spectacle, la populace n’en a cure d’eux et se moque d’eux allègrement. Ils font vraiment pitié car les bandits comme Pablo Escobar sont considérés comme des héros par les habitants de ces quartiers.
Faisons un rêve.
Et si les nôtres de bandits arrêtaient tout simplement la politique et la haute administration pour se lancer dans le trafic de drogue, les enlèvements et autres trafics d’influence, mais au grand jour ? Car en matière de meurtre, ils ont assez de sang sur les mains pour concurrencer leurs quasi-collègues des favelas. Au moins, ils ne donneront plus l’illusion d’être au service de ce même peuple qu’ils tuent, pillent et mentent pire encore que des arracheurs de dents.
Je me suis amusé un jour à faire un calcul, sur la base des dires d’fonctionnaire africain, exerçant au sein d’une régie financière. Cet homme n’avait même pas le titre de DG, de Directeur divisionnaire ou quelque chose comme ça. Il a dit que des mois durant, chaque soir, en quittant son lieu de travail, il avait en poche cinq-cents mille francs CFA. Au total, en poche, deux millions cinq-cents mille. Pour un mois, dix bons millions étaient perdus pour le Trésor public mais s’envolaient vers des cieux que lui seul connait (je vous passe les autres détails de ses confidences).
Alors, si lui, en quelques mois il peut se faire autant d’oseille, que dire alors des gens plus haut placés ? Ils peuvent donc très bien nous libérer ces espaces en une seule année d’exercice et aller jouer aux bienfaiteurs ailleurs. Non ?
Obambe GAKOSSO, June 2014©