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8 mai 2014

Afrique : et si on se concentrait sur les vrais combats ? (Merci Joseph Ki-Zerbo!)

Classé dans : Lectures — Obambé Mboundze GAKOSSO @ 1 h 34 min

J’ai ressorti de mes cartons un livre sorti en et pour lequel j’avais ressenti un certain plaisir à lire. Certes, la présence du nom de Joseph Ki-Zerbo en première page de ce livre est en soi déjà une incitation à le dévorer, mais le titre aussi est une vraie, une immense interpellation : Á quand l’Afrique ?

Livre

Beaucoup d’enseignements sont à tirer de cet excellent ouvrage d’entretiens de 239 pages avec le journaliste René Holenstein. C’est le regard lucide d’un vieil Africain qui a roulé sa bosse pour le continent. Qui a voué sa vie pour ce continent, jusqu’à ce son dernier souffle.

On parle souvent de cet homme comme d’un très grand historien. C’est rapidement oublier qu’il a aussi été un homme politique qui avait crée le Parti pour la démocratie et de le progrès (PDP), et qu’il s’était très tôt opposé au régime des jeunes révolutionnaires burkinabè (avec comme maître Thomas Sankara).

Á cette époque, il était exilé à Dakar.

Lui, né dans l’enclos colonial qui s’appelait naguère Haute-Volta, le 21 juin 1922, aura vécu en France où il aura fait ses études supérieures et aussi en Guinée où il fit partie du contingent des cadres africains chargés de remplacer au pied levé les colons français qui en rentrant chez eux avaient tout emporté, arrachant même les câbles et fils électriques des bureaux.

Ce livre est une sorte de testament que le vieillard signait. C’est une sorte de passage de flambeau.

Ce qui m’a le plus touché dans ce livre c’est le propos d’un jeune homme, à l’endroit du vieil homme : Nous ne voulons pas être développés. Ce que nous voulons, c’est être heureux.

Dans toutes les langues africaines, je suis convaincu que les mots « heureux », « bonheur » ont des équivalents. Mais comment dit-on « développer » ? « Se développer ? »

Á mon avis, ce jeune homme avait en grande partie cerné nos problèmes. Les problèmes de ce peuple tellement malmené, perdu en grande partie, souffrant d’une aliénation plus plus comme on aurait un palu ++. Nous passons notre temps, quand nous avons un peu posé les fesses dans des facs et autres établissements d’enseignements supérieurs, à gober des concepts auxquels non seulement nous ne comprenons pas grand-chose, mais aussi auxquels leurs propres concepteurs ne comprennent rien. Comme disent les jeunes, « ils n’y pigent que dalle ! » eux-mêmes. J’aime bien cette sentence du Pr. Mwene Nzale Obenga qui dit « Les États-Unis se développent tous les jours, mais ils ne le disent pas ! »

Chez nous, il suffit de bâtir un pont, même sur un ruisseau que l’on peut traverser à pieds, pour crier à tue-tête que « Nous sommes sur la voie du développement ! »

Notre Liberté nous a été arrachée depuis des lustres. Combien de nos élites politiques, combien de nos universitaires se donnent le temps de la réflexion puis de l’action afin que ce mot ait de nouveau un sens pour nous ?

La majorité des Hommes sur cette Terre – pour ne pas dire tout le monde – est en réalité lancée dans une course effrénée vers le bonheur. Qui n’aspire pas à être heureux ? Même si chacun de nous a sa définition, a sa conception du bonheur, on ne m’ôtera pas dans l’idée que la jeunesse africaine, toutes proportions gardées, est la plus sacrifiée au monde. On l’oblige souvent à parler des langues qui ne sont pas les siennes. On l’oblige la plupart du temps à étudier dans des langues que leurs parents ne leur parlent guère. On l’oblige à consommer, quand elle est en ville, des produits non conçus, non élaborés sur son continent, avec une traçabilité plus que douteuse. Elle aura beau vivre au milieu de champs de coton, on l’oblige à porter des vêtements fabriqués loin de chez elle. Elle pourra travailler dans des champs de cacao, elle ne mangera jamais le produit fini qui en est issu.

Je peux multiplier ainsi les exemples, mais la jeunesse africaine en est là et les faits, qui sont têtus, ne contredisent point ce constat.

Leurs aînés, formés dans des universités africaines, ou occidentales (ce qui revient au même car les programmes sont conçus en Occident), ne parlent que de macroéconomie, de PIB, de PNB, de croissance, de développement, d’émergence. Du soir au matin. Il suffit de regarder nos TV et d’écouter nos radios. La Liberté, le bonheur des leurs, voilà des sujets qui leur sont totalement étrangers et d’ailleurs, ils ont en réalité peur de les prendre à bras-le-corps.

Notre aîné Ki-Zerbo, décédé en 2006 lui, avait compris la chose et voilà pourquoi le propos de ce jeune homme qui aurait pu être son petit-fils l’avait marqué au point qu’il l’avait repris dans son livre.

Prenons-en de la graine et sortons des paradigmes bâtis et construits par autrui afin de nous aliéner de plus belle, chaque jour que Dame Nature fait.

 

Obambe GAKOSSO, May 2014

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