Réfugiés africains dans la Likouala: abandonnés aux dons japonais
La région de la Likouala (on dit département, depuis le retour du PCT* aux affaires) est la région la plus septentrionale du Congo-Rive droite. Elle fait 66.044 kilomètres carrés (soit plus que la Belgique et la Moldavie réunies, plus que le double de la réunion du Liban et d’Israël) pour 61.358 habitants, soit même pas un arrondissement de Mfoa, la capitale politique du Congo-Rive droite.
Cette région est frontalière de la RCA et de la RDC**. Ces deux pays voisins connaissent des soubresauts avec des violences sur les populations, poussant ces dernières, quand elles le peuvent, à travers les frontières fluviale (Congo) et terrestre pour trouver refuge dans la Likouala. Le Congo étant très fâché avec les statistiques, c’est le HCR***qui nous a informés en date du mercredi 18 décembre 2013 dernier qu’il y avait dans la Likouala 11.000 Centrafricains ayant fui les conflits dans leur enclos colonial. Tout le monde sait combien la gestion du pouvoir de François Marc Bozizé-Yangouvonda a été une catastrophe à grande échelle pour la RCA, de 2003 (arrivée suite à un putsch) jusqu’en 2013 (départ, chassé par un autre putsch). Les vivats et autres acclamations qui avaient accueilli l’arrivée de la coalition Seleka ne laissaient pourtant rien présager de bon. Certains ont cru naïvement, très bêtement même je dirais, que ce grand territoire de plus de 622.000 kilomètres carrés (France + Danemark+Belgique). La violence est plus que jamais le lot quotidien dans ce territoire et les Congolais qui voient d’un très mauvais œil les aides diverses apportées par le contribuable congolais, via nos autorités, devraient faire l’effort de ne pas avoir la mémoire courte et se souvenir qu’en 1997, quand ça avait chauffé au Congo, la RDC et le Gabon furent d’excellentes terres d’accueil. Sinon, je crois qu’on aurait eu bien plus que les 15.000 morts officiels…
En 2010, l’on comptait 114.000 réfugiés de la RDC dans la Likouala****. Soit quasiment le double de la population locale. Si certains sont ont traversé le fleuve dans l’autre sens, d’autres (combien?) sont restés.
Cet afflux massif de réfugiés pose de véritables problèmes évidents que tout le monde peut deviner: santé, nutrition, emploi. Pour ne citer que ces trois-là. Comment ces questions sont gérées au niveau local? Comment ces questions sont traitées entre les 3 États? Côté RCA, il faut oublier car manifestement, si au Congo, on parlerait d’embryon d’État, en RCA, je ne sais pas quel terme utiliser. Franchement. Quant aux deux Congo, ces deux pays qui depuis la nuit des temps auraient dû bâtir ce fameux pont tant souhaité, chanté par le regretté Franklin Boukaka, ils gèrent cette question à la petite semaine. De façon vraiment désastreuse.
Calamiteuse.
L‘UA*****? Certes, les réfugiés congolais et centrafricains ne sont pas les seuls sur le continent. Nous en comptons au Togo et au Ghana, qui ont fui les dozo de la Côte d’Ivoire. Il y a des Ruandais en RDC, qui ont fui leur pays il y a bientôt 20 ans. Il y a. Il y a. Le fait est que l’UA en réalité nous confirme son surnom de coquille vide quand il faut s’occuper véritablement des masses africaines. S’il était question d’un homme politique de premier plan, réclamé par le tribunal colonial appelé CPI, l’UA aurait fait bloc par le biais de son syndicat de chefs d’États, toujours prompts à défendre les leurs. Les questions des réfugiés sur notre continent ou quand les nôtres quittent Kama sont sous-traitées auprès des ONG’s occidentales et auprès de l’ONU, via son HCR.
C‘est tout de même incroyable que nos dirigeants refusent d’apprendre de notre passé. Et personne n’aura l’excuse de dire Notre histoire n’est pas écrite car là, il s’agit d’une histoire très immédiate. Dès que l’ONU met ses pieds quelque part sur notre continent, le nombre de morts est multiplié exponentiellement. Les ONG’s qui arrivent pour nous « aider », quels contrôles avons-nous sur elles?
Voilà donc que pour s’occuper des réfugiés dans la RCA, j’apprends que hier, mardi 04 février 2014, le Japon a fait un don de vivres par le biais du PAM d’une valeur de 1,3 milliards de XAF (1.981.837,22€), le don étant composé de 1.312 t de farine de maïs et de 667 t de petits pois. C’est le ministère des Affaires sociales (dirigé par Mme Emilienne Raoul) qui aura la charge de procéder à sa distribution.
Certains des nôtres, encore une fois, dans la logique de leurs éternelles mains tendues pour quémander, vont applaudir et même déboucher des bouteilles de champagne pour fêter cela car comme ils aiment si bien à le dire Si nous recevons autant de dons, c’est parce que notre président a de bonnes relations. On a les gloires que l’on croit avoir…
Le Japon est un pays de montagnes essentiellement (63% de la surface totale) et ce pays importe pour 26 millions de t de céréales avec une part de 65% de maïs, soit 16.900.000 t. Quelles est la part de maïs importée que le Japon est si « généreusement » venu offrir aux pauvres réfugiés de chez nous? Quelle en est sa qualité avec les questions nucléaires que le Japon connait, notamment depuis le drame de Fukushima?
Ces questions, ni l’UA, ni la RDC, ni le Congo-Rive droite, et encore moins la RCA, ne se les posent. On va prendre ces produits et si on est honnêtes, tout sera distribué. Si, comme d’habitude, on s’amuse à jouer à je retiens, je revends discrètement, je n’ose imaginer combien d’entre nous vont se retrouver avec ces produits à la traçabilité inconnue de nous, dans l’estomac.
La grande et éternelle question en pareilles circonstances est la même: quand est-ce que nos dirigeants passeront à une étape supérieure, celle où ils comprendront que gouverner, c’est aussi gérer ce genre de choses et que c’est tout simplement honteux d’accepter ce genre de « dons », d’ « aides » alors que nos parkings ministériels sont remplis de quatre-quatre coûtant au bas mot 70.000.000 de XAF (106.714,31€) l’unité et que des clans au pouvoir, dès qu’ils débarquent à Paris, y dépensent en babioles appelées « produits de luxe » ce qui pourrait nourrir ces pauvres réfugiés une année entière, voire plus.
On peut irresponsable une. On peut aussi l’être de temps en temps. Mais tout le temps, à ce point, cela relève de la psychiatrie lourde.
Obambe GAKOSSO, February 2014©
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*: Parti congolais du travail
**: République Centrafricaine et République démocratique du Congo
***: Haut commissariat aux réfugiés
****: Alexis Thambwe Mwamba, interpellé à l’Assemblée nationale à Kinshasa, au début de l’année 2010. Actuellement, le PAM estime ces réfugiés à 30.000.
*****: Union Africaine
******: Programme alimentaire mondiale