Epurebere, adi ibo ya ndziya yo: le blog d'Obambé Mboundze Ngakosso

Kemet (l'Afrique), les Kamit (les Africains), leurs relations avec le reste du monde, les essais qui me frappent, etc., voilà les sujets de cet espace

30 janvier 2014

Il y a 40 ans, le Colloque du Caire

Classé dans : Histoire — Obambé Mboundze GAKOSSO @ 17 h 42 min

Une semaine. Sept jours.

Une période qui ressembla à une éternité pour les présents car ce jour-là, le destin de l’humanité se jouait sous leurs yeux et il ne fallait surtout pas se louper.Les deux

Ces sept jours furent les 28, 29, 30, 31 janvier, 01, 02 et 03 février de l’an mil neuf cent-soixante-quatorze. Ils étaient au Caire, capitale de l’Égypte actuelle. Sous l’égide de l’UNESCO, deux Africains, et pas des moindres, croisaient le fer, la plume et la parole avec un parterre de ce que l’Occident comptait de plus prestigieux, dans les domaines de l’égyptologie, de l’histoire, de l’archéologie etc.

Trois camps s’affrontèrent durant cette semaine et la bataille fut rude. Il ne fallait pas être un poids plume pour y prendre la parole. Les billets d’avion ne furent pas payés pour rigoler mais bien pour faire taire définitivement ces deux Nègres que sont Cheikh Anta Diop, natif du Sénégal, né en 1923 et son disciple, Mwene Nzale Obenga, né au Congo en 1936.

Pour mémoire, il y avait un autre Africain, natif des USA, William Henry Sheppard (1865-1927) qui avait déjà séjourné dans le territoire de l’actuelle RDC. En plus d’avoir dénoncé les atrocités commises par les Belges sur les Africains, son étude des Kuba lui avaient permis d’apprendre qu’ils venaient du Nord-Est de l’Afrique. De l’Égypte, conclura Sheppard après avoir remarqué les similitudes entre leur organisation et celle de l’Égypte du temps des pharaons. Ça, c’était pour le monde anglophone.

Avant lui, un autre Africain, natif d’Ayiti, Joseph Anténor Firmin (1850-1911). Ce dernier, en plus d’avoir été ministre de la Guerre de son pays, bien avant Sheppard avait déjà affirmé (1885), sur la base de ses études anthropologiques, L’Égypte ancienne est Africaine, Nègre, par la géographie, la race, la culture, l’esprit, les valeurs, la royauté sacrée et divine, l’esthétique, la linguistique.

Malgré ces colossaux travaux, malgré ces apports inestimables, nombre de chercheurs occidentaux n’en avaient cure et pour eux, c’était tantôt des extraterrestres (ET), tantôt des Asiatique, tantôt des Européens qui étaient partis de chez eux pour venir en Afrique et y bâtir la plus prestigieuse des civilisations que le monde ait connu. Le fait est que même quand on n’est pas, comme moi, un spécialiste de la question on ne peut que considérer comme un bavardage inutile ce qui est souvent dit dans cette littérature africaniste. Une question simple devrait tarauder l’esprit de l’esprit le plus simplet qui soit en ce bas monde: pourquoi ces civilisateurs orientaux et occidentaux n’ont pas bâti cela chez eux et ont marché des kilomètres entiers pour venir le faire chez nous? Bon, pour les ET, je ne pose pas de questions, car je ne suis jamais allé sur une autre planète que la terre.

Les thèses de C.A. Diop et de M.N. Obenga, ne cessant d’énerver ces gens pour qui le Nègre ne pouvant pas avoir crée quoi que ce soit, ne pouvait être à l’origine de ces choses, l’UNESCO avait décidé de leur donner la parole, ensemble, une semaine durant.

J‘ai beau aimé les sciences (celles qui ne mentent pas), il y a des moments, je comprends les africanistes car quand on se se base sur un homme, considéré comme un des esprits les plus brillants que l’Europe ait porté, à savoir G.W.F. Hegel (1770-1831) qui déclare l’Égypte pharaonique ne fait pas partie de l’univers culturel négro-africain, comment ne pas s’arc-bouter à ses convictions, même si elles sont en bois? Et surtout d’un bois de ce qu’il y a de plus léger!

On avait donc cette semaine-là les trois camps suivants:

  • Le plus important fut le camp des africanistes occidentaux. Leur théorie est que, le peuple ayant créé la civilisation pharaonique était un peuple blanc venu d’Europe, ayant atterri en Afrique pour accomplir cette mission (sic!), tout en bronzant et en se métissant avec des éléments africains (noirs) au fil du temps. Bien entendu, pour ce camp le peuple pharaonique était un peuple d’origine blanche européenne, et que les teintes et les couleurs de peau sombre ou noires « qu’il est possible » voir sur les fresques pharaoniques n’étaient que les résultats d’un métissage*;
  • Celui des orientalistes ou des spécialistes des civilisations dites orientales. Pour eux, un peuple était venu d’orient pour créer cette civilisation sur le sol africain**;
  • Pour finir, il y avait l’autre camp, composé d’hommes qui disaient que la civilisation pharaonique était une civilisation noire, créée par des Noirs et appartenait au monde africain. Cette ligne était incarnée par C. A. Diop et son disciple, M. N. Obenga. Bien entendu, comme il fallait s’y attendre, c’était le camp le plus contesté par les deux autres camps, celui des « chercheurs et spécialistes » occidentaux et orientaux. Ces derniers, via leurs media, avaient déjà réussi à faire comprendre à la terre entière que la civilisation pharaonique n’avait rien de noire.

On connait l’issue du match: les deux premiers camps furent vaincus par KO tant les coups assénés par les deux fils de Kama, Diop et Obenga furent d’une violence inouïe. On ne sera vraiment pas du tout vulgaire en disant que les autres sont repartis chez eux la queue entre les jambes. Au poker, ils seraient rentrés tout nus sans même leurs lunettes et je me demande si on ne les aurait pas rasés pour bien marquer la chose.

Les conclusions sont connues. Elles sont sur la place publique et seules les personnes de très mauvaise foi refusent de nos jours de les accepter. On peut y revenir sur ce Colloque et je ne ferai jamais l’économie de ne pas y revenir.

Cependant, je terminerai en pensant à ces frères et sœurs qui me disent souvent, Pourquoi vous les disciples de Diop et d’Obenga parlez tout le temps de ce Colloque et ne faites jamais autre chose?

Je comprends tout à fait cette question et ma réponse ne varie pas:

  • Je ne suis pas spécialiste de ces questions mais un homme qui en apprend tous les jours et qui essaie, en toute modestie, d’être un vulgarisateur fidèle de la pensée de ces deux hommes, que je considère comme maîtres miens. Il y a malgré tout un nombre important (pas assez, je le concède) de chercheurs kamites qui suivent les pas de ces deux hommes et dont la production intellectuelle mériterait d’être beaucoup plus connue qu’elle ne l’est. Mais gageons que le temps soit notre meilleur allié à ce niveau;
  • Nous ne mesurons pas assez combien le monde a changé cette semaine-là. Nous, Africains, avons tellement subi de revers, d’humiliations que nous avons fini par banaliser chaque instant de nos vies. Même quand des Hommes se réunissent pour parler de notre civilisation et que cela fait date, que cela change le centre de gravité de certaines choses, nous trouvons cela banal et nous parlons du Colloque du Caire comme on parlerait d’une partie de ngola (awale) entre un licencié en lettres modernes (au chômage) et un docteur en sociologie (au chômage aussi) dans une rue africaine, attendant qui, que sa compagne lui fasse un morceau de poisson à manger, qui, que sa maman lui cuise un plat de pondu. Triste…

 

Obambe GAKOSSO, January 2014©

———————————-

*: J’aimerais savoir si nos Vieux n’avaient pas rigolé (encore une fois) ce jour-là…

**: On peut rire ou pas?

 


 

Laisser un commentaire

 

Posedepierre |
Sylvie Marcotte - Mon CV |
Blogtech |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Liumx91
| Ecrirelemonde
| Plaisirsdelavie