Psychodrame à Mfoa: on prend les mêmes et on recommence
Voilà encore le Congo en train de se distinguer très négativement en transformant sa ville-capitale politique en far West.
De nouveau.
Encore une idée à laquelle on peut facilement casser le cou.
Combien de fois n’a-t-on pas entendu cette parole qui pour certains est un véritable bréviaire: Il n’y a que Sassou qui peut garantir la paix dans le Congo car il maîtrise le pays et les Congolais.
J‘entends cette phrase depuis 1993, année où le président Pascal Lissouba, à peine élu, avait eu l’idée de faire bombarder deux arrondissements de notre capitale, le premier (Makelekele) et le deuxième (Bacongo).
Certains Congolais ont des analyses qui mériteraient de figurer dans des annales d’humour. Vraiment! Qu’appelle-t-on « maîtriser »? Voilà encore un verbe, un mot qui est utilisé à tort et à travers, dans ce pays où tout le monde se prend pour un agrégé de grammaire française alors que cette langue qui n’est pas la nôtre est d’une complexité sans fin.
En 1990, lorsque les partis politiques ont de nouveau eu droit de cité au Congo, nous avions naïvement cru que non seulement la démocratie était de retour mais qu’en plus, nous aurions la paix.
Words, words, words.
Leurres, leurres, leurres.
Si nous avons pu choisir librement nos dirigeants en 1992 (avec un taux de fraude très faible, extrêmement faible), dès novembre 1992, la paix avait disparu, rentrée chez elle, sous des cieux plus cléments. 3 morts ponctueront un meeting organisé par l’opposition congolaise, tués par des membres de la Force publique.
En 1993, ce sont des chars qui sortaient pour bombarder des populations civiles dont certaines n’avaient même pas un coutelas pour se défendre. On parlera de 3.000 morts.
Combien de pères de familles dans le lot? Combien de mères de familles? Sachant que dans nos pays, une personne qui a une activité salariée nourrit au bas mot 10 personnes, je ne vous dis pas le carnage économique en plus.
Comme si cela ne suffisait pas, en 1994, le carnage a repris.
Estimant sans doute que tout ce qui a été fait jusque là était de la roupie de sansonnet, les dirigeables de ce pays ont décidé de remettre ça le 05 juin avec la guerre sans doute la plus terrible que le Congo ait connue à ce jour. En octobre 1997, on décrétera la fin de cette guerre et l’on dira qu’il y a eu 15.000 morts. Encore une fois, au bas mot.
Des mutilées et des mutilés à vie qui seraient sans doute toutes et tous morts aujourd’hui sans l’aide de leurs proches.
Des maisons détruites et les seuls qui ont été indemnisés furent des proches du camp vainqueur de la 1997.
Des édifices publics détruits et jamais remis en état de fonctionnement correct.
J‘en passe des pires.
Les naïfs qui croyaient que le retour aux affaires de Denis Sassou Nguesso allait mettre fin (définitivement) à ce cycle infernal de la violence, à ces emballements terribles, avaient encore une fois tapé à côté et s’étaient enfoncés plus que le doigt dans l’œil.
Comment a été la fin de l’année pour les habitants de Bacongo et Makelekele en 1998? N’est-ce pas ces mêmes hommes armés qui y étaient allés pratiquer la boucherie?
Les rails se retrouveront même sciés plus tard, empêchant de fait le trafic ferroviaire entre les deux plus grandes villes du pays. Jusqu’en 2000, le pays ne connaitra pas cette paix tant cherchée, recherchée et vantée.
Les armes finalement ne se seront pas tues longtemps car le dimanche 04 mars 2012, les habitants de la capitale avaient l’impression de revivre un énième épisode de toutes les péripéties trop récentes. Le quartier de Mpila était dévastée et ailleurs, on avait recommencé à mettre des baluchons sur la tête, histoire de repartir vers ces villages qui ont vu nos parents naître et grandir.
Allez dans ce quartier de Mpila et voyez comment la désolation y règne en maîtresse incontestée. On a « blagué » les gens en donnait 3.000.000 de francs coloniaux par-ci, 3.000.000 de francs coloniaux par-là. Et les Congolais, sages et obéissants, se sont contenté de pleurer, de sécher leurs larmes, d’enterrer les leurs et de prendre les sous. Sans broncher.
Encore une fois, le pouvoir a dû se dire, On les a bien eus, ces pauvres diables! C’est nous qu’on est les plus forts!
Et avant-hier, c’est la Force publique que l’on envoie au domicile d’un cacique du pouvoir, acteur déterminant de la Guerre de 1997. Pourquoi? Seuls cet homme et le pouvoir en place peuvent nous répondre. On a vu les photos du carnage. Il y avait là de la viande à ne plus finir. Voilà ce qu’est devenu l’Africain, pour nombre de nos dirigeables: de la chair à farce dont on peut faire ce que l’on veut, où on veut et comme on veut.
Vous a-t-on parlé de l’école privée située à quelques mètres du domicile de cet officier? Les pauvres enfants qui y étudiaient, comment ils ont vécu ces moments forts?
La faillite, l’échec des dirigeables congolais n’est plus à démontrer: ces gens le démontrent tous les jours en nous indiquant ce sur quoi ils marchent, dansent, se couchent et courent parfois. Ça s’appelle, Le chemin d’avenir.
Drôle de chemin…
Après la Guerre de 1997, l’universitaire Mwene Nzale Obenga avait commis ce qui demeure à mes yeux le meilleur ouvrage jamais écrit sur la vie politique au Congo, L’Histoire sanglante au Congo-Brazzaville (1959-1997) – Diagnostic d’une mentalité politique africaine (Présence Africaine, 1998). Il est vraiment dommage que ce livre soit depuis des années introuvable car certains gagneraient vraiment à le lire…
Obambe GAKOSSO, December 2013©