Jacques Loubelo n’est plus
Je vous parle d’un temps
Que les moins de vingt ans
Ne peuvent pas connaître
C’est à ces paroles de la chanson culte de Chahnourh Varinag Aznavourian dit Charles Aznavourian que j’ai pensé au début de l’écriture de ce billet. Vous me direz, Mais quel lien entre Aznavour et celui dont il est question ? Pour ceux qui savent un tout petit peu comme moi, ils sauront que le lien est musical. Mais il est accessoire par rapport au sujet.
J’ai appris hier le décès de ce grand homme. Chanteur, poète hors pair qui savait chanter en lingala, en lari, en teke et en embosi. Oui, Jacques Loubelo, né en 1940 dans le Pool fait partie d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. Je dirais même les moins de trente ans.
Cet artiste discret et modeste était très connu du grand public plus par sa voix que par son visage. Il m’a d’ailleurs fallu me retrouver hors du continent pour mettre un visage sur cette très belle voix dont les chansons passaient régulièrement sur ce que nous appelions naguère La Voix de la révolution congolaise. La radio officielle du pays. D’ailleurs, nous n’en avions qu’une seule.
Qui, de ma génération, n’a pas fredonné une seule fois une de ses magnifiques mélodies ? Sa chanson qui m’a le plus marqué est Mor’obe (mauvaise personne*). Je rigole même en écrivant cela car c’est il y a quelques années à peine, en ayant un CD de lui entre mes mains que j’ai appris que cette magnifique chanson portait ce titre.
Qui ne se souvient pas de ces belles paroles chantées dans tois langues africaines?
Kalimbiri we mburu ba si we
Ntsi lo we ba sa boni munya
Ba sa ba sa ka ba lelu we
Ba sa ba sa ma yelu we
Ba loyi ba si ba si nga na kali kuna
Nzambi ba wa meh hein !
Men mutsie he, mwani Ngampio
Men mutsie he, mwani Ngaliema
Men mutsie he, mwana Ngalifuru
Men mutsie he, Ntsurukyo
(…)
Nda Beya eh, Nda Beya noh di mor’obe
Atipo eh, Atipo noh di mor’obe
Elend’eh, Elende noh di mor’obe
Malonga eh, Malonga noh di mor’obe
Wo toni mwana moro Okemba
Fura wa ticket A buruna mboa eh!
Wo toni mwana moro Atipo
Fura wa ticket A buruna mboa eh!
Wo toni mwana moro Okemba
Fura wa ticket A buruna mboa eh!
Wo toni mwana moro Otunga Beya
Fura wa ticket A buruna mboa eh!
Ah! Ngoli eh!
Mama Ntsona mama, ndevokela kwani mama Ntsona ah!
Mama Ntsona mama tala bu nshiri mama Ntsona, ah!
Bu kwenda bu kwenda mboko wa tala manimange mama
Bu kwenda bu kwenda balula mabandza mama, eh !
(…)
Je n’ai jamais eu l’occasion d’aller à un concert de cet artiste de talent, dommage. Il manquera à coup sûr à notre scène musicale, lui qui savait chanter aussi bien le Congo que l’amour, la famille et l’école. Rien à voir avec ces artistes sans le moindre talent érigés en star et qui en une chanson de 15 mn citent les noms des habitants de la rue Moundzombo, de la rue Loudima, de la rue Mayama, de la rue Gamboma, de la rue Franceville, de la rue Djambala etc. moyennant 100.000 francs coloniaux ou plus.
J’espère que le pays saura lui rendre un hommage à sa mesure.
Repose en paix, cher aîné et merci pour tous ces moments de joie que tu nous as apportés durant ces décennies de carrière musicale.
Obambe GAKOSSO, September 2013©
———————————————-
*: De “moro” = la personne, l’être humain et de « obe » = le mal. Bien entendu, de ma part, c’est une traduction libre.