De l’importance des mots en spiritualité
Plus d’une fois par jour, je ressens l’envie d’écrire sur les mots, les phrases. Pas n’importe quels mots. Même s’ils sont des mots de tous les jours. Je pense souvent aux mots par lesquels on nous désigne ainsi que notre environnement. Des mots qui sont à la base issus de langues étrangères à notre continent (portugais, espagnol, français etc.) mais qui par la force des choses sont devenus des butins de guerre, pour reprendre le bon mot de feu Kateb Yacine, l’écrivain algérien disparu en 1989 à l’âge de 60 ans.
Le plus criard concerne sans doute la spiritualité africaine et tout ce qu’il y a autour. Il y a des mots que nous entendons, que nous prononçons depuis notre enfance sans même chercher à savoir ce que ça veut dire. Nous ne faisons pas l’effort de faire un peu de linguistique. Pourtant, pas besoin d’avoir un diplôme dans cette discipline.
Décortiquons les mots, regardons leurs origine et on est chaque jour ahuri de se rendre compte que nous disons des choses sans savoir ce que ça veut dire et, le pire est que nous ne savons même pas les traduire dans les langues africaines. Pourquoi? Pour la bonne et simple raison que cela ne veut rien dire. C’est tout simplement intraduisible. Quand on les ramène dans notre contexte, quand on est un peu rigoureux, on arrête et on passe à autre chose. Tribu, ethnie etc. Ces mots ne veulent rien dire dans nos langues. Ils n’existent même pas. Bon, aujourd’hui, contentons-nous de la spiritualité. Nous aurons le temps d’approfondir la chose. Commençons par un article de African History qui fait un travail excellent sur un réseau social. Bonne lecture!
Obambe GAKOSSO, August 2013©
LA SPIRITUALITÉ AFRICAINE: TERMES A PROSCRIRE ET A NE PLUS UTILISER
Voici une série de termes et d’expressions non exhaustives qu’on retrouve dans le langage et les expressions des uns et des autres lorsqu’il s’agit de parler spiritualité africaine :
Fétichisme : attribution de qualités mystiques et religieuses aux objets inanimés. Du portugais feitiço (« artificiel », et par extension « sortilège »),nom donné par les portugais aux objets du culte des populations d’Afrique durant la colonisation de ce continent, lui-même dérivé du latin facticius (« factice »). C’est le même mot qui a donné les termes fétiche et féticheur
Animisme : L’animisme (du latin anima, qui signifie souffle) est la croyance en des âmes, ou a des esprits (qui sont assimilés à des souffles respiratoires).
Polythéisme : C’est la croyance à plusieurs dieux. Le terme, qui vient du grec poly (nombreux) et theoi (dieux), a été inventé par l’auteur juif Philon d’Alexandrie.
Paganisme : C’est un terme générique employé depuis le VIe siècle par des chrétiens de façon péjorative pour désigner la religion de ceux qui ne sont ni chrétiens, ni juifs. Il remonte au latin paganus (paysan), le terme qui a donné paien. Ce terme peut être rapproché de la notion de kafir en islam.
L’idolâtrie : C’est l’adoration d’une image, d’un astre, d’une idée ou d’un objet. Le nom idolâtrie vient (par haplologie) du mot grec eidololatria, formé de eidolon, « image » ou « représentation », et latreia, « adoration ». C’est la considération d’une image ou d’un objet comme étant un dieu.
Comme nous pouvons le constater, ces mots pour désigner la spiritualité africaine sont des mots qui ne viennent pas du vocabulaire africain mais qui viennent du vocabulaire de peuples non africains. Ces mots venant d’un vocabulaire non africain ont été utilisés pendant longtemps par les peuples non-africains, ne comprenant pas véritablement le sens de la spiritualité africaine pour diaboliser, déprécier et critiquer, rabaisser et attaquer la spiritualité africaine et a en donner une image négative, afin de convertir les peuples africains (de gré ou de force a leurs doctrines) et de les coloniser. ces termes ne rendent donc pas véritablement compte en toute fidélité, de la vision spirituelle de nos ancêtres et de la vision spirituelle de notre continent. Il en est de même pour les mots comme sorcier,sorcellerie, marabout, magie, magicien, mysticisme, etc…
Dans les langues africaines, les significations authentiques des mots pour désigner nos pratiques spirituelles et religieuses ont des sens positifs, qui n’ont rien à avoir avec ces descriptions péjoratives et négatives venant des peuples non-africains, qui ont tellement porté atteinte a l’image de la culture africaine aux yeux des autres peuples et dans l’imaginaire collectif de nombreux africains. C’est pourquoi nous devons retourner à nos langues, qui renferment le sens authentique de nos propres mots et expressions. Ainsi le sens de nos pratiques, ou le sens des termes utilisés par nos ancètres, tels les termes comme nganga, houngan, babalawo, etc… ne nous échapperons plus, ou n’aurons plus un sens négatif, mais retrouveront dans les yeux des uns et des autres, leurs sens originel et profond.
Pour ceux qui ne parlent pas ou ne comprennent pas forcément de langues africaines, un terme plus approprié pour désigner la spiritualité africaine et ses pratiques pourrait être celui-ci : la spiritualité primordiale. Le terme primordial renferme la notion de premier et de plus ancien, car l’africain étant le premier être humain de l’humanité, sa spiritualité (spiritualité africaine) est la première et la plus ancienne spiritualité du monde. On pourrait aussi utiliser le terme kemitisme, un terme dérivé du la racine Kam ou kem, signifiant noir en égyptien ancien. Hotep !!!