W.E.B. Du Bois in « Les âmes du peuple Noir »
De William Edward Burghardt Du Bois, les Africains, qu’ils soient militants ou pas, ont surtout retenu l’ardent militant panafricaniste qu’il fut. Oui, W.E.B. Du Bois fut un grand Africain et un grand Panafricaniste, de ceux qui refusaient de courber l’échine de pratiquer l’aplatventrisme devant qui que ce soit, qu’il fut Blanc ou d’une autre couleur de peau.
Un des autres aspects de ce grand homme est son œuvre littéraire. Il était de ces militants qui avaient aussi écrit. Une œuvre de qualité. Quel plaisir cela a été pour moi de relire en ce mois de juin son livre, Les âmes du peuple noir (The souls of Black folk). C’était à la base une collection de 14 essais ( !) parue en 1903. L’auteur avait alors 35 ans et déjà une belle et riche carrière universitaire, avec des diplômes à foison.
Il faut toujours se remettre dans le contexte de l’époque pour bien saisir la portée des choses. Les jeunes États-Unis d’Amérique sont un pays en plein essor économique avec une population noire qui continue à subir tous les affres possibles depuis qu’elle a été déportée d’Afrique. Alors, pour un Noir de cette époque, étudier relève tout simplement du mirage, du miracle, de la magie et de la sorcellerie réunis. Je n’ajoute même pas la chimère et l’illusion. Mais Du Bois n’en avait cure. Il est allé à l’école et, à force travail, malgré un racisme viscéral (dont il sera lui-même victime), il continuera à lire, à bûcher dur. C’est grâce par exemple à ses jobs d’été qu’il financera trois années (1880-1890) d’études dans celle qui est toujours aujourd’hui l’une des universités les plus prestigieuses au monde (si ce n’est la plus prestigieuse). Harvard, j’ai nommé ! Après avoir étudié aux USA et à Berlin (Allemagne), il rentre achever ses études à Harvard. En 1895, il est premier Noir à y décrocher un doctorat en philosophie. Excusez du peu…
Les âmes du peuple noir est un ouvrage écrit pour montrer le génie et l’humanité de la race noire** et sa lecture, sa relecture est un vrai plaisir. C’est une ode à l’espérance. Une conviction que l’on peut vraiment renaître. Mais cette renaissance, la renaissance de notre peuple, pour sortir des abîmes dans lesquels nous semblons plonger collectivement, cela doit passer par l’éducation. L’Éducation. Et c’est cet angle que j’ai choisi de prendre dans l’ouvrage de l’illustre aîné. La manière dont il en parle, la manière avec laquelle il décrit le contexte (extrêmement difficile de l’époque, il faut le rappeler sans cesse) dans lequel il allait à l’école, dans lequel d’autre enfants Noirs y allaient aussi. Que ce soit les cases, les cloches, les familles, tout est décrit dans les moindres détails, soulignant bien le sérieux de cet homme qui semblait ne rien négliger.
Je vous en souhaite une très bonne lecture et un excellent dimanche !
Obambe GAKOSSO, June 2013©
* : Le livre a été réédité en France 0 La Découverte/Poche et est vendu à 12€50, traduction française, évidemment.
** : Je reprends ici l’idée telle qu’elle était définie. Même si, en français, le mot « race » n’est plus de mise, aux USA, ça n’a pas changé.
Le plus grand succès du Bureau des Affranchis réside dans l’établissement d’un système d’écoles libres pour les Noirs ; l’idée d’une éducation élémentaire gratuite pour tous dans le Sud se répandit largement. Non seulement le bureau recruta des institutrices, par le biais d’associations de bénévoles, et leur construisit des écoles, mais surtout il permit de découvrir et d’aider ces apôtres de la culture humaine que furent Edmund Ware, Samuel Armstrong ou Erastus Cravath. Dans le Sud, l’opposition à l’éducation des Noirs fut immédiate et féroce, et se traduisit par des insultes, des incendies et du sang ; car pour le Sud, un Noir instruit était un homme dangereux. Et le Sud n’avait pas entièrement tort car l’éducation pour tous a toujours introduit, et introduira toujours, un élément de danger et de révolution, d’insatisfaction et de mécontentement. Néanmoins, les hommes luttent pour l’accès à la connaissance. C’est peut-être l’intuition de ce paradoxe, même dans les temps troublés du bureau, qui a aidé les baïonnettes à apaiser l’opposition à l’instruction des hommes, opposition qui couve toujours aujourd’hui dans le Sud, mais qui ne s’enflamme pas. les universités de Fisk, Atlanta, Howard et Hampton furent fondées à cette époque, et six millions de dollars furent consacrés à l’éducation, dont sept cent cinquante mille dollars fournis par les affranchis eux-mêmes, malgré leur pauvreté.
Finalement Obambé, tu fais une suite à la vidéo que j’ai vu la dernière fois, celle de Francis Seck je crois ?
C’est un beau travail que celui de reprendre par thèmes l’approche Dubois, c’est un monument et un précurseur que j’ai découvert à l’adolescence. Il a fait partie des noms qui ont inspiré mon père. Il y’avait donc une parfaite cohérence entre ce que je lisais et ce que je pouvais avoir comme modèle environnemental Ceci dit, nous avons eu aussi des discussions plus tard, lorsque j’ai lu d’autres auteurs comme West ou Hurston. Il faudrait que je les relise mais globalement je pense me souvenir que je n’appréciais (déjà) pas du tout le tout masculin de ces grands espoirs d’affranchissement de l’esprit. Mais bon… C’est un détail….
A suivre…
Grace