Epurebere, adi ibo ya ndziya yo: le blog d'Obambé Mboundze Ngakosso

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7 février 2013

La dernière lettre de Lumumba à sa femme

Classé dans : Lectures — Obambé Mboundze GAKOSSO @ 10 h 29 min

Nous devons célébrer nos héros et martyrs. Les célébrer ne signifie point que nous passons notre temps à regarder dans le rétroviseur. Non ! Point de tout cela. nous avons des jeunes et des moins jeunes qui méconnaissent notre histoire et ce n’est pas toujours de leur fait. J’ai eu encore à échanger avec une sœur qui se posait des questions sur les problèmes actuels de l’Afrique et je peux vous dire que ce genre d’échanges est un exercice plus que passionnant.

La dernière lettre de Lumumba à sa femme dans Lectures pel

Patrice Emery Lumumba n’était pas qu’un tribun. Ce n’était pas que cet homme capable de rassembler des foules et de faire voter la majorité en son nom, au-delà des tribus. C’était aussi un époux et un père de famille. Sachant très bien que le combat qu’il menait était très difficile, malgré les erreurs et les fautes commises dont certaines ont participé à sa dernière capture, il n’a eu de cesse de penser aux siens et la lettre que je vous mets en ligne aujourd’hui, il l’avait adressée à son épouse Pauline, née Opango. Texte poignant qui devrait circuler au maximum. Voilà de la nourriture spirituelle qui ne peut qu’alimenter nos veines et nos artères pour les immenses défis du continent. Bonne lecture !

 

Obambé GAKOSSO, February 2013©

 

Ma compagne chérie,

Je t’écris ces mots sans savoir s’ils te parviendront, quand ils te parviendront et si je serai en vie lorsque tu les liras. Tout au long de ma lutte pour l’indépendance de mon pays, je n’ai jamais douté un seul instant du triomphe final de la cause sacrée à laquelle mes compagnons et moi avons consacré toute notre vie. Mais ce que nous voulions pour notre pays, son droit à une vie honorable, à une dignité sans tache, à une indépendance sans restrictions, le colonialisme belge et ses alliés occidentaux – qui ont trouvé des soutiens directs et indirects, délibérés et non délibérés, parmi certains hauts fonctionnaires des Nations-Unies, cet organisme en qui nous avons placé toute notre confiance lorsque nous avons fait appel à son assistance – ne l’ont jamais voulu.

Ils ont corrompu certains de nos compatriotes, ils ont contribué à déformer la vérité et à souiller notre indépendance. Que pourrai je dire d’autre ? Que mort, vivant, libre ou en prison sur ordre des colonialistes, ce n’est pas ma personne qui compte. C’est le Congo, c’est notre pauvre peuple dont on a transformé l’indépendance en une cage d’où l’on nous regarde du dehors, tantôt avec cette compassion bénévole, tantôt avec joie et plaisir. Mais ma foi restera inébranlable. Je sais et je sens au fond de moi même que tôt ou tard mon peuple se débarrassera de tous ses ennemis intérieurs et extérieurs, qu’il se lèvera comme un seul homme pour dire non au capitalisme dégradant et honteux, et pour reprendre sa dignité sous un soleil pur.

Nous ne sommes pas seuls. L’Afrique, l’Asie et les peuples libres et libérés de tous les coins du monde se trouveront toujours aux côtés de millions de congolais qui n’abandonneront la lutte que le jour où il n’y aura plus de colonisateurs et leurs mercenaires dans notre pays. A mes enfants que je laisse, et que peut-être je ne reverrai plus, je veux qu’on dise que l’avenir du Congo est beau et qu’il attend d’eux, comme il attend de chaque Congolais, d’accomplir la tâche sacrée de la reconstruction de notre indépendance et de notre souveraineté, car sans dignité il n’y a pas de liberté, sans justice il n’y a pas de dignité, et sans indépendance il n’y a pas d’hommes libres. 
Ni brutalités, ni sévices, ni tortures ne m’ont jamais amené à demander la grâce, car je préfère mourir la tête haute, la foi inébranlable et la confiance profonde dans la destinée de mon pays, plutôt que vivre dans la soumission et le mépris des principes sacrés. L’histoire dira un jour son mot, mais ce ne sera pas l’histoire qu’on enseignera à Bruxelles, Washington, Paris ou aux Nations Unies, mais celle qu’on enseignera dans les pays affranchis du colonialisme et de ses fantoches. L’Afrique écrira sa propre histoire et elle sera au nord et au sud du Sahara une histoire de gloire et de dignité. Ne me pleure pas, ma compagne. Moi je sais que mon pays, qui souffre tant, saura défendre son indépendance et sa liberté.

Vive le Congo ! Vive l’Afrique !

Patrice Lumumba

5 réponses à “La dernière lettre de Lumumba à sa femme”

  1. ETOILE dit :

    Cette lettre existe en lingala, je l’ai traduis en français au bac de lingala comme option..! tres émouvant…!

    Etoile

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