Le lynchage de Kangni Alem

La question va vous sembler saugrenue car je vois très bien certains d’entre vous me dire Mais qui est Kangni Alem ? Kangni Alem est le nom de plume de cet ami. Kangni Alem est mon ami et je ne serai pas très surpris d’apprendre un jour qu’il est aussi devenu votre ami. Il aura 47 ans le 21 avril prochain.

Kangni Alem fait partie des auteurs dont, du jour où j’ai lu un livre, je me suis jeté régulièrement sur les autres. Et il y a du boulot, je peux vous dire…

Bon, Ignak, comme j’aime l’appeler, n’aime pas le football. Je dirais même qu’il abhorre ce sport que je considère comme un art. vous me direz que c’est son droit, et moi j e vous dirais, que moi non plus, je le pense. Sauf que récemment, Ignak a failli être lynché par ses étudiants.

Ah ! oui, j’ai omis de vous dire que notre ami (j’espère qu’il l’est devenu pour vous aussi) est aussi enseignant-chercheur à l’Université de Lomé (il enseigne la littérature et le théâtre). Et, à cette occasion, très récemment, il nous a informés sur un réseau social, qu’il failli être lynché par ses étudiants, lors du match Togo-Algérie (2-0), après notamment le premier but des Éperviers du Togo.

Franchement, entre nous, en toute sincérité : quelle idée de donner cours en pleine Coupe d’Afrique des Nations, pendant que l’équipe nationale joue ? L’Afrique a failli perdre un passionné de théâtre, un homme qui transmet avec sa passion ses passions, tout ça parce que je ne sais qui a eu l’idée de programmer le cours au moment même où la Nation avait les yeux rivés vers l’Afrique du Sud pour voir les jeunes défendre les couleurs du pays ?

Moi, à la place d’Ignak, je n’aurais même pas pris ce risque car cette religion qu’on appelle football, je vous le rappelle a provoqué 6.000 morts et fait 15.000 blessés en 1969 entre le Honduras et le Salvador, lors des éliminatoires du Mundial 1970 (Mexique).

Je pense que notre ami Ignak a eu la bonne idée d’arrêter son cours après l’ouverture du score par les Éperviers. Cela a pas mal d’avantages :

-          Il demeure en vie ;

-          Il demeure en bonne santé ;

-          Vu qu’il voue le foot aux gémonies, il peut en profiter durant ce temps pour nous écrire le prochain Prix Ewé ;

-          Il peut s’en aller siffler un bon bidon de tchoukoutou.

Après le match, la semaine qui suit par exemple, je peux lui suggérer de faire travailler nos jeunes étudiants sur l’ouvrage de feu le Polonais Ryszard Kapuscinski, La guerre du foot (2003, Plon). Ils auront de belles choses à raconter.

Obambé GAKOSSO, February 2013

———————————————————————————-

* : Il a publié La gazelle s’agenouille pour pleurer (nouvelles, 2003) ; Un rêve d’albatros (2006) ; Cola Cola Jazz (roman) ; Canailles et charlatans (roman, 2005) ; Esclaves (roman, 2009) ; etc.