La corruption n’est pas une fatalité, Aïssatou Boiro l’a prouvé
Aïssatou Boiro, Nuhu Ribadu, Sidi Sosso Diarra* et John Githongo. Je ne sais pas si ces quatre personnes ont eu l’occasion de se rencontrer. Cela aurait donné sans aucun doute une réunion de très haute qualité, nous changeant des séminaires et autres colloques où l’argent des africains est vraiment gaspillé au quotidien.
Au Kenya, il y a quelques années, Githongo** avait le poste de Secrétariat permanent à l’Éthique, taillé sur mesure pour cet économiste. Il était le Monsieur anti-corruption du pays. En 2005, depuis London, il annoncera sa démission car n’ayant pas les moyens de continuer à mener son travail comme il se doit. Le Kenya et l’Afrique rataient là une grande occasion. Son aîné Diarra (né en 1946 et Githongo en 1965) sera porté au poste de Vérificateur général. Il montera une équipe de juristes, d’économistes, de fiscalistes, de gestionnaires etc. pour traquer les cas de corruption. Ses adversaires finiront par avoir sa tête et en 2011, il retournera à son cabinet… Ribadu, né en 1960 a semé la terreur dans les milieux véreux du Nigeria, ce pays que l’on présente souvent comme l’un des plus corrompus au monde. Les succès se suivent et il est porté aux nues. Il échappe à des tentatives d’assassinat et, peut-être pour le protéger, il est envoyé en formation à London en 2009.
Mme Boiro, épouse d’un professeur d’université*** et mère de quatre enfants, n’a pas eu la même chance que Ribadu. Le 09 novembre 2012 dernier, à 21 heures, elle était dans son véhicule de fonction, accompagnée de son chauffeur. Pendue au téléphone, pendant qu’ils sont coincés dans les embouteillages, elle lui dit Sors-nous de là. Ce seront les derniers que cette brave femme prononcera. Un homme, habillé en tenue militaire, descend d’un véhicule et tire deux balles. Une l’atteint en plein cœur : elle meurt sur le coup !
Mme Boiro avait réussi à démanteler en mai dernier un réseau qui avait failli détourner 13 milliards de FG (Francs guinéens, soit 937.772.804,15 XAF). Si nous avons besoin de femmes et d’hommes de cette envergure sur notre continent, capables de résister à la corruption, nos princes devraient savoir que ces gens ont besoin d’être protégés. De tous les articles que j’ai lus, je n’ai trouvé nulle part trace d’un service de sécurité prêt à mourir pour elle. Comment une personne de son rang, avec les risques encourus pouvait s’asseoir à la droite du chauffeur ? C’est hallucinant. On n’envoie pas ainsi une femme d’un tel talent au casse-pipe. C’est vraiment une catastrophe et cette question devrait être une préoccupation permanente. C’est bien beau de faire de grandes obsèques etc., mais on aurait pu éviter cela, surtout dans un pays comme la Guinée où les armes se baladent depuis plus de 15 ans. Que son âme repose en paix et merci à elle pour tout le travail abattu. Elle a prouvé que la corruption n’est point une fatalité : on peut la combattre !
Obambé GAKOSSO, December 2012©
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* : Sidi Sosso Diarra est le frère aîné de Cheick Modibo Diarra, récent Premier ministre malien. Il est expert comptable de formation et possède son propre cabinet d’expertise comptable.
** : Son père, Joe Githongo, expert comptable, avait pour client entre autres Jomo Kenyatta, premier président du Kenya.
*** : Ibrahima Boiro est professeur de biologie et directeur du Centre d’études et de recherche en environnement de l’Université de Conakry
Quelle tristesse. Quatre orphelins de plus. Je n’ai pas entendu parler de ce décès, il faut dire que je suis très en retard dans mes podcast de RFI. Je ne crois pas à la fatalité non plus. L’histoire se répète jusqu’à un certain point, la roue tournera si nous nous montrons capables tous autant que nous sommes d’être des exemples pour les enfants qui nous regardent. Je ne risque d’oublier Aissatou Boiro.
Miss K.!
Malgré la tristesse qui nous accable en apprenant le décès de cette Dame, en pensant à son époux et à leurs enfants, ton message plein d’optimisme met du baume au cœur.
Hasta siempre la victoria!
@+, O.G.