La énième mort de Firmin Mahé
Le 05 décembre dernier (mercredi), je posais la question de savoir si le procès à Paris, suite à l’assassinat en 2005 de Firmin Mahé, en Côte d’Ivoire, je faisais part de certaines de mes appréhensions. Je n’ai pas été déçu du voyage.
Aucun des militaires jugés ne fera de prison. Cela a été un meurtre de sang-froid, pas du tout accidentel. Il avait été abattu froidement. Pour eux, le prétexte était tout trouvé : c’était un coupeur de route. C’est quand même curieux mais, dans les démocraties qui se disent grandes, même les plus grands criminels ont droit à une arrestation puis à un procès. Dans certaines démocraties qui se disent grandes, la peine de mort est abolie. Pourquoi le pauvre Firmin Mahé, s’il était réellement un coupeur de route n’a pas eu droit aux mêmes égards, de la part des militaires français, que les bandits d’Occident ?
Lors du procès, aucun élément n’est venu confirmer, étayé le fait que cet homme était coupeur de route. Aucune preuve. Toujours est-il que par exemple, pour la journaliste e France24 (hier soir), Firmin Mahé était toujours supposé être un coupeur de route. Pourtant l’avocat, Me Fabien Ndoumou l’a répété quand il a été interrogé : Mahé n’était pas le bandit présenté.
Au moins on saura que si l’on sert sous les couleurs françaises, on peut aisément abattre un homme et avoir juste quelques mois de sursis :
- Le colonel Eric Burgaud, qui a reconnu avoir donné l’ordre de tuer Mahé* a eu 5 ans avec sursis ;
- L’adjudant-chef Guy Raugel qui a étouffé Mahé avec un sac en plastique a eu 4 ans avec sursis ;
- Le brigadier chef Johannes Schnier, qui le maintenait, qui le tenait lors de son étouffement, a pris un avec sursis ;
- Le brigadier Lianrifou Ben Youssouf qui était le chauffeur du véhicule a lui été acquitté : et moi qui croyais naïvement que dans le droit français, la non-assistance à personne en danger était passible d’une condamnation…
Le droit est compliqué et les méandres du droit encore plus ! L’avocate générale, Me Annie Grenier avait requis 5 ans ferme contre Burgaud, 5 ans dont 3 ferme contre Raugel, etc. Non seulement le verdict n’a aucunement suivi les réquisitions de l’avocate générale, mais en plus, la peine maximale encouru pour ce genre de crimes est de 30 ans de prison ferme. Rien de tout cela.
Le continent se retrouve encore humilié par ce procès inique. Immense déception aussi pour les parents du pauvre Mahé qui sont allés assister à ce spectacle macabre : la vie de leur époux, frère etc. ne valait vraiment rien. Comme celle des Ivoiriens bombardés par les chars français à Abidjan, le 07/11/2004. Comment peut-on se dire hommes d’honneur quand on st dans un char et que l’on bombarde des populations civiles à mains nues ? Ces images sonr gravées dans ma mémoire, surtout celle de cette femme, ensanglantée, dont le cadavre traînait devant le palais présidentiel où logeait le président Koudou Gbagbo. La vérité avait fini par jaillir : c’était un énième coup d’État tenté contre les autorités ivoiriennes. Après plusieurs échecs contre la Côte d’Ivoire et malgré la déportation de Gbagbo en 2011, c’est comme si la France officielle n’avait de cesse de se venger de ce peuple qui lui a rendu la vie difficile depuis 2000. Chaque jour qui passe apporte son lot d’humiliations. Ainsi va la Françafrique !
Obambé GAKOSSO, December 2012©
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* : Eric Burgaud dira qu’il avait reçu l’ordre du général Henri Poncet qui, bien entendu a tout nié. Burgaud dira même de lui, Je ne savais pas avoir été commandé par un psychiatre, je pensais avoir été commandé par un chef, je m’aperçois que ce n’est pas le cas. J’affirme devant vous que le général Poncet ici présent m’a bien donné l’ordre dont j’assume la totale responsabilité de l’avoir transmis, moi, mais pas cet homme-là