La démocratie à la Française

C’est fait. Conformément aux grandes traditions démocratiques française, Monsieur Jean-François Copé a été élu démocratiquement président de son parti, l’UMP (Union pour un mouvement populaire). Ce parti revendique 300.000 militants et l’on parle de 105.000 électeurs. Soit 35% des militants.

Pourquoi des militants qui ont leurs cartes de membres et qui sont peut-être à jour de leurs cotisations resteraient chez eux au lieu d’aller choisir leur nouveau chef ? Voilà des questions que des responsables politiques devraient se poser. Un parti qui, de par ses textes ne peut permettre que deux candidatures, alors qu’il se dit démocratique, dans un pays qui se dit tout autant démocratique, c’est tout de même curieux.

Dimanche très tôt le matin, nous étions un petit groupe à sortir d’une veillée mortuaire. Cela faisait un moment que je n’étais pas passé par cet endroit précis et je l’ai trouvé changé. Un d’entre nous s’est exclamé : Mon Dieu ! comme ça a changé. C’est bien la preuve que le Blanc est Dieu. Comme c’est beau. Chez nous, on serait bien incapable de faire ça !* Alors que j’étais déjà en train de bouillir intérieurement et que je m’apprêtais à lui rentrer dans le lard, un homme dans notre groupe, bien plus âgé que nous deux l’a repris en lui disant que c’était ridicule de dire des choses pareilles et que si chez nous, les décideurs le voulaient, on pourrait faire autant et même mieux car il n’y avait là rien d’extraordinaire.

Vous allez me demander, Mais quel est le rapport entre l’élection à l’UMP et cette anecdote ? C’est bien simple. Je suis né et j’ai grandi dans un pays où l’on ne jure que par a France. Et quand je dis la France, je suis gentil car le modèle c’est le Blanc. Tout ce que fait le Blanc est bon. Même très bon. On a tous vu comment le PS (Parti socialiste), au milieu d’une pagaille extraordinaire donne pour perdante celle qui visiblement a gagné l’élection, la native de Dakar, Ségolène Royal. Dans une émission politique qui suivra ces résultats, Olivier Duhamel* renverra dans les cordes des membres de l’UMP qui se gaussaient des résultats du PS en leur rappelant que c’était très coutumier qu’il y ait des fraudes dans les élections des partis politiques dans ce pays.

Rien de nouveau sous le soleil, donc. Mais il n’y a que nous, dans les pays CFA, pour croire que les modèles de démocratie à travers le monde ne valent rien s’ils ne sont pas estampillés Label France. C’est ainsi que nous avons été conçus, modelés, modélisés. Je suis même sûr que nos média doivent en faire des gorges chaudes, sans analyses profondes. Par exemple, est-il normal qu’un homme qui est chef sortant puisse utiliser de la sorte tous les moyens du parti (fichiers etc.) pour mener sa campagne ? Les amis du « perdant », François Fillon savaient dès le départ que les dés étaient pipés. Mais ils y sont allés quand même. Ils avaient en tête ce qu’avait dit S. Royal au sujet de celui qui tient l’appareil du parti : il gagne les élections.

En France, on appelle ça la démocratie. Moi, cette démocratie-là, je n’en veux pas.

Obambé GAKOSSO, November 2012©

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* : Politologue, juriste, universitaire et ancien député européen (PS)