Plus royaliste que le roi
En mai 2010, le président rwandais, Paul Kagamé, accordait une interview journaliste français (Jeune Afrique), François Soudan. Le sujet iranien et l’arme nucléaire furent au menu de cet entretien. La réponse de cet homme me plut énormément.
Question : Quelle est votre position sur l’Iran et sur le dossier du nucléaire iranien ? Êtes-vous favorable aux sanctions ou pensez-vous que Téhéran a le droit de poursuivre son programme, militaire ou non ? Réponse : Ma position est de ne pas en avoir. Je n’ai ni informations particulières ni influence sur ce sujet, et encore moins l’envie d’être entraîné dans un débat dont je ne maîtrise pas tous les aspects.
On ne peut apprécier cet homme. Je sais combien son nom est source d’injures, d’insultes, de quolibets etc. en RDC et au sein d’une partie de la diaspora aussi bien de ce pays que rwandaise. Cette réponse est non seulement très intelligente mais ‘une clairvoyance et d’une prudence plutôt rares. Chez nos leaders politiques. Ces questions ne nous concernent pas directement. Les Africains n’ont pas à se mêler de ces questions. Nous n’en avons non seulement aucun intérêt, mais en plus, nous devons consacrer notre temps et notre énergie à régler les questions de notre peuple.
Les Africains ont un continent à reconstruire. Une agriculture à remettre sur pieds afin que nous soyons de nouveau autosuffisants sur le plan alimentaire. Nous avons une armée panafricaine à mettre en place car les lieux de conflit ne manquent guère chez nous : Cabinba, Sahara, Casamance, Mali, Soudan, Somalie, RDC etc.
Si Paul Kagamé l’a compris, visiblement, il n’en est pas de même pour Alassane Dramane Ouattara. J’ai été effaré il y a peu, en tombant sur la RTI (Radio télévision ivoirienne), de voir cet homme, debout, devant le drapeau de son pays, faire un discours pour féliciter le président américain, Barack Hussein Obama, suite à sa réélection le 06/11 dernier. Quel est donc ce goût pour la servilité, pour le paraître, pour l’aplatventrisme qui peut pousser nos dirigeants à vouloir être plus royalistes que le roi ? La Côte d’Ivoire a un ambassadeur à Washington. Ce dernier ne peut faire le job en transmettant le message de félicitations de son pays ? Faudrait-il mobiliser la télé nationale pour cela ?
Je ne me souviens pas qu’il m’ait été donné une seule fois de voir un Premier ministre européen ou un président occidental faire de même suite à l’élection d’un de nos présidents, fut-il son ami de 10 ou 50 ans. Il n’y a que chez nous que l’on assiste à des scènes aussi pitoyables, et je me demande bien ce que nous y gagnons. Il y a 42 ans, à la mort de Charles de Gaulle, la France a vu comment Jean-Bedel Bokassa pleurait à chaudes larmes celui qu’il appelait un peu trop affectueusement « papa », ce qui dérangeait totalement ce dernier. Image ridicule d’une Afrique à genoux, à terre devant un Occident qui s’en gausse en se disant chaque fois que ce n’est pas demain la veille que les chaînes de l’esclavage, présentes dans nos têtes, vont se briser. Pauvres de nous !
Obambé GAKOSSO, November 2012©