Desmond Tutu honoré par la Fondation Mo Ibrahim
Décidément le Soudanais Mo Ibrahim et sa fondation ne jamais rien comme les autres. Cette année, c’est l’archevêque sud-africain, Desmond Mpilo Tutu, 81 ans depuis le 31/10 dernier, qui a été récompensé. Ce choix ne manquera pas de faire grincer des dents. Des litres entiers de salive vont encore être déversés, surtout dans l’Afrique partiellement francophone où l’on accusera encore une fois Ibrahim et sa fondation de faire la part belle aux « anglophones ».
Les critères de sélection sont clairement énoncés sur le site de la Fondation. Le lauréat doit
- être un ancien chef d’État ou de gouvernement africain
- avoir été élu démocratiquement
- avoir quitté ses fonctions au cours des trois dernières années
- s’être limité à la durée constitutionnelle de son mandat
- avoir fait preuve d’un leadership exceptionnel.
Desmond Tutu n’a jamais été chef d’État et il ne le sera sans doute jamais, sauf accident de l’histoire au sein de l’ANC* et au sein de l’Nation arc-en-ciel. Même si les prix en général ont forcément un caractère subjectif, nous savons que les récipiendaires en tirent très souvent une certaine fierté et parfois de la gloire aussi. Certains paient même, font du lobbying pour en recevoir. Mais ce prix a un caractère trop bloquant pour nos princes : le fait d’avoir quitté le pouvoir. Cela fait mal et même très mal aux princes françafricains qui sont persuadés que le pouvoir leur est dû et comme me le rappelait un aîné lors d’un échange, Cet homme, depuis son enfance, on sentait qu’il était né pour être président de la République.
Ibrahim et sa fondation ne l’entendent point de cette oreille. Il suffit de voir les noms des différents récipiendaires :
- 2011 : Pedro Verona Rodrigues Pires (Cabo Verde) ;
- 2008 : Festus Gontebanye Mogae (Botswana) ;
- 2007 : Joaquim Alberto Chissano (Moçambique) ;
- Madiba Mandela, lauréat honoraire.
Comme on peut aisément le lire, pour 2009 et 2010, ce prix n’a pas été attribué et pour 2012, aucun ancien président non plus ne répondait aux critères. Je suis souvent réservé question distribution des prix. Mais j’aime bien la rigueur et l’excellence dont font montre les membres de cette fondation, à commencer par Ibrahim himself ! Il faut dire que cet homme de 66 ans, après avoir travaillé pour quelques entreprises dans les télécommunications a crée un jour sa propre boîte, Celtel, qu’il vendra en 2005 à 3,4 milliards de dollars, alors que sa société comptait 24 millions d’abonnés !
J’aimerais vous laisser du temps, un jour, une semaine, un mois pour trouver d’autres exemples de réussite comme la sienne sur notre continent : cela ne court pas les rues. C’est cette rigueur, cette excellence qu’il a voulu mettre au service de l’Afrique avec cette fondation qui fait de bonnes et très belles choses. Cette excellence, je rêve de la voir briller un peu partout sur mon continent et au niveau de beaucoup d’enfants d’Afrique, hors du continent. J’ai toujours en mémoire cette très belle phrase de James Emmanuel Kwegyir Aggrey (1875-1927) : Seul le meilleur est assez bon pour l’Afrique.
Obambé GAKOSSO, November 2012
——————————————————————————————
* : African National Congress, parti au pouvoir en Afrique du Sud