Exil des Africains : tant qu’on refusera d’analyser les raisons, on racontera des balivernes !
DANS le numéro des Dépêches de Brazzaville du jeudi 12 juillet 2012, j’ai lu un entrefilet évoquant la fuite de trois joueuses congolaises de hand-ball. Ceci en une avec à la fin cette phrase : Les raisons de la fuite de ces handballeuses ne sont pas encore connues. C’est un sourire qui s’est affiché sur mon visage en lisant cela.
JE saute en page 16 pour lire l’article complet et, encore une fois, je souris. La plupart des articles écrits par des journalistes congolais, pour ne pas dire tous, sont dénués d’analyse. On nous relate souvent des faits (de fort mauvaise manière, la plupart du temps) et on laisse le lecteur se débrouiller. Bien entendu, je pense que chaque information que nous recevons doit être pesée, soupesée, évaluée et réévaluée. Et dès que nous en avons l’occasion, il faut aller chercher d’autres sources. Mais tout de même, les journalistes congolaises se surpassent à ce niveau. Ce sont vraiment des dépêches qui nous sont livrées, peu importe l’organe de presse diffusant l’information. Bon, parfois, ils font un effort de réflexion et là, on a des laudateurs qui passent les plats, qui tartinent les morceaux de pains des Hommes dont ils parlent et qui sont tout le temps les Hommes du pouvoir en place. Triste. Pathétique.
CELA fait des décennies que les sportifs africains, comme d’autres Africains d’ailleurs, quittent leu continent par tous les moyens et, visiblement, il ne vient pas à l’esprit de beaucoup de journalistes congolais de se poser la question de savoir pourquoi. Quand, comme je l’ai souligné plus haut, ce journaliste écrit, Les raisons de la fuite de ces handballeuses ne sont pas connues, il se moque de qui ? Quel est ce Congolais, quels sont ces Africains qui peuvent nous dire qu’ils ne savent pas pourquoi ce phénomène est si courant ? Aux larges du Sénégal, de la Mauritanie, du Maroc etc. jusqu’aux larges de la Libye, de jeunes Africains risquent leurs vies dans des embarcations de fortune pour aller chercher un mieux-être en Occident. A ce loto, il y a les morts, il y a ceux qui se font attraper par la patrouille et repartent de force dans leurs pays, et il y a les élus ou ceux qui croient l’être : c’est la minorité. Une infime minorité. On sait pourquoi : raisons économiques la plupart du temps. Et nos sportifs obéissent à cette même règle.
TOUT le monde se souvient du pauvre Jean-François Samba qui naguère joua à l’AS Cannes. Après sa blessure, que fit l’État congolais pour ses soins ? Jean Manga Onguéné, du Cameroun, subit le même sort. Ce talentueux footballeur se blessa au genou juste avant le mondial 82 : il sera abandonné à son triste sort et ne s’en remettra jamais. Tout cela, nos sportifs, en football comme en hand-ball le savent très bien et la moindre occasion est propice pour fuir cette jungle immense dans laquelle ils ont du mal à s’épanouir. Le professionnalisme n’étant pas pour demain, je me souviens avoir vu des sportifs de haut niveau rentrer chez eux, le soir, exténués après des entraînements plus ou moins intensifs, à pied, sans le moindre sou en poche pour se payer un bus ou un taxi.
CHAQUE Congolais connaît au moins un clandestin, sportif ou pas, qui prend le risque de devenir un fantôme au pays des Blancs. Il est persuadé que s’il se bat, il aura de temps en temps la possibilité d’envoyer 100€ (plus de 65.000 XAF) à sa famille au pays. Hier encore, un aîné m’a dit qu’il a reçu des demandes pressantes de la part de parents proches du côté de Mfoa, demander des sous et une de dire, Cela fait deux jours que nous n’avons pas mangé. Mais à part ça, on des journalistes qui disent qu’ils ne savent pas pourquoi des sportifs profitent des compétitions internationales pour fuir le pays….
Obambé GAKOSSO, July 2012©